Dernière modification de l’article le 21 mars 2020 par Admin

Quel enseignant, quel formateur ne s’est pas plaint du manque d’attention de ses élèves ou de ses stagiaires ? Imaginez, le plaisir de parler face un auditoire attentif, sans être distrait par les téléphones portables, sans aucun bavardage. Le pied! Alors pourquoi cela n’arrive-t-il pas si souvent ?

Il y a 2 situations où il est difficile d’avoir une attention soutenue :

a/ des classes ou des groupes surchargés où il y a un effet de groupe ;

b/ des classes ou des groupes d’élèves en primaire, où la capacité de concentration est moins élevée chez l’enfant.

Mais on peut  observer aussi ces mêmes problèmes de concentration et d’attention avec un public d’adultes pourtant cessés être motivés. Alors que se passe-t-il ? N’y aurait-il plus de respect ?

Savez-vous que rester 6 heures, voire plus, assis dans une salle et écouter un professeur, un formateur, n’a rien d’évident. C’est même assez difficile pour la concentration. C’est d’ailleurs ce que je remarque lorsque je fais mes formations en établissement : les participants (des enseignants et des formateurs) se rendent vite compte de cette difficulté. Et certains adoptent les mêmes comportements dissipés que leurs élèves. Amusant non ?!

Le but ici n’est pas de plaindre ou de trouver des excuses aux comportements, mais de faire un simple rappel  à une réalité souvent un peu oubliée et d’apporter une vision sous un angle de vue qui vous aide à trouver des solutions.

Alors que pouvez-vous faire pour améliorer l’attention et la concentration de votre public durant votre cours? C’est ce que l’on va voir dans cet article.

Par Jean-François MICHEL

( Auteur « Les 7 profils d’apprentissage » Ed.Eyrolles 2005, 2013 et 2019 )

Quand on apprend dans une salle de cours, le processus de mémorisation est très sollicité.

Le recours à la mnémotechnique ou à l’entraînement de la mémoire peut demeurer vain s’il n’y a pas l’ingrédient le plus important : la concentration.

La concentration permet d’optimiser la capacité de mémorisation et favorise le travail de créativité. Mais plus facile à dire qu’à faire. Car se concentrer n’est pas toujours quelque chose de facile : l’esprit a tendance à divaguer, l’attention est dérangée par des pensées étrangères difficiles à chasser. Pourquoi ? 2 raisons à cela.

 

Une concentration et une attention de 20 minutes maximum

Savez-vous que l’attention humaine ne dépasse pas 20 minutes au maximum.

Il n’y a pas réellement d’études sérieuses menées sur ce chiffre de 20 minutes. Mais il y a consensus chez les scientifiques basées essentiellement sur des observations [1]. La concentration et l’attention déclinent même à partir de 10/15 minutes [2].

Les célèbres conférences TED dispensées un peu partout dans le monde imposent maintenant un format de 18 minutes maximum, car après, l’attention du public décline [2 et 3].

Une enquête sous la direction de Stacey Stothard de Skipton Building Society [4], à partir d’un échantillon significatif de personnes, indique que la concentration et l’attention des Britanniques ne dépassent pas en moyenne de 14 minutes… Celle-ci est de 10 minutes en moyenne au volant, ensuite le cerveau du conducteur se met en pilote automatique.

Cette même enquête a révélé que la capacité d’attention est plus longue dans les situations impliquant des amis ou lorsqu’il y a un côté humoristique. Il peut s’écouler jusqu’à 29 minutes avant que les gens prennent leur téléphone et perdent leur attention.

La concentration et l’attention varient selon les moments de la journée : la chronopsychologie.

L’effort de concentration varie selon la difficulté de la tâche et bien entendu selon sa durée. Plus celle-ci est longue plus la capacité de concentration est sollicitée. De même que plus la tâche à réaliser est exigeante, complexe, plus l’effort de concentration à fournir est important. Et c’est le cas dans une situation de cours où il est demandé aux élèves de rester attentifs et concentrés durant 6h00 de cours voir plus, assis dans une salle.

Combien de temps peut-on maintenir la concentration à son niveau le plus efficace ? En général pour obtenir un rendement optimum tout au long de la journée il est préférable de faire 10 minutes de pause pour une heure de travail et d’attention soutenue. Mais les périodes où la concentration reste efficace varient en fonction de la complexité de la tâche, mais aussi de l’état de fatigue. Il a été démontré que la vigilance et l’état de fatigue fluctuent selon les périodes de la journée.

Par exemple en matinée, on serait plus efficace à partir de 9 heures jusqu’à 11 heures 30 environ. L’étude de ces cycles journaliers et leur adaptation ont donné naissance à une nouvelle discipline : la chronopsychologie [4].

Le moment le moins propice aux efforts intellectuels et de concentration se trouve après le repas. Pourquoi ? Car la digestion réclame énormément d’énergie. Plus le repas du midi est lourd, plus l’énergie consommée par la digestion sera importante. D’où le fameux « coup de barre » qui se manifeste peu de temps après avoir mangé. Et là bien évidemment c’est à ce moment que les facultés de concentration et d’attention sont les plus faibles.

Je vous laisse imaginer la capacité de concentration des élèves après avoir fait leur midi dans un fastfood. D’autant que selon la chronopsychologie, le début d’après-midi est la période la moins favorable à un effort de concentration.

L’attention et la concentration sollicitent énormément les capacités cérébrales.

Le cerveau ne pèse que 2% du corps, mais réclame une bonne partie de l’énergie. Il est donc normal de se sentir fatigué après un effort intellectuel. Pour réduire cette fatigue, il est important de faire le plein d’énergie. Le cerveau reçoit l’énergie sous forme de glucose. Donc il faut penser à bien se nourrir en sucre rapide, et, si possible, de privilégier le sucre contenu dans les fruits (fructose). Sauter un repas ou pire s’abstenir de prendre un petit déjeuner copieux est une garantie de fatigue qui se répercutera sur la concentration durant la journée.

Quand vous remarquez cette baisse de concentration à ces moments de la journée, ne soyez pas surpris. Ce n’est pas forcément un manque de volonté des élèves.

Si vous ne tenez pas compte de cette fluctuation de la concentration durant la journée, vous risquez d’inonder les élèves d’informations, surtout quand vous voulez avancer dans votre programme. Et c’est le meilleur moyen de noyer et de les démotiver vos élèves, surtout pour ceux qui n’ont pas de profil d’apprentissage vraiment adapté à cette façon d’enseigner : par exemple si l’enseignement de votre matière est essentiellement auditif et qu’il est difficile de faire autrement, comme le français, la philosophie, les langues étrangères.

Vous me direz que dans votre établissement la pause n’est pas toutes les heures, mais au bout d’une heure trente voire deux heures. Le problème est qu’il est difficilement d’arrêter le cours pour faire une pause de 10 minutes toutes les heures pour respecter la chronopsychologie des élèves.

Voici quelques idées pour améliorer la concentration et attention de vos élèves.

1. Varier les activités pédagogiques : donner du rythme

L’astuce est de varier la demande d’attention et de concentration en donnant du rythme. Comment ? En faisant des coupures dans votre cours, ce que les Anglo-saxons appellent les « Attention Breaks ». Voici une trame possible que vous pouvez utiliser.

Commencer le cours par les concepts théoriques durant 20 minutes. Ensuite, demandez à vos élèves de faire des exercices durant 20 autres minutes. Le mieux est de privilégier le travail en groupe. La difficulté est de reprendre la concentration. L’astuce est de répartir sur un petit exercice de réflexion plutôt que de demander de vous écouter de nouveau. Il y a un temps d’inertie entre le moment où vous recommencez le cours et l’attention des élèves. Puis, reprenez le cours. Et ainsi de suite. Ainsi vous donnez du rythme.

2. Du mouvement et des pauses

Le mouvement ne veut pas dire qu’il fasse faire des exercices physiques aux élèves, mais les amener à se lever et à se déplacer. Pas toujours facile à faire. Voici quelques astuces.

Les groupes d’exercices : Encouragez les élèves à se déplacer pour constituer un groupe pour faire des exercices. Demander qu’ils évitent de faire l’exercice avec le voisin ou la voisine, mais de se lever, de se déplacer. Vous pouvez même imposer les groupes pour que chaque élève se lève de sa chaise et se déplace. C’est un moment de relâche de 5 minutes tout à fait bénéfique. Si les élèves mettent du temps, bougent plus que vous ne l’estimez nécessaire… Laissez faire, c’est souvent un moment de répit utile demandé par le corps.

Des mini-exposés de 5 minutes : Vous pouvez demander à vos élèves de faire un mini exposé à chaud sur des points qui viennent d’être évoqués en cours. Vous associez 2 effets bénéfiques : le mouvement par le déplacement pour rejoindre le tableau et le changement d’activité. Le temps que l’élève désigné se déplace, vous créez un « break », un moment de relâche, pour les autres élèves. Il y a des bavardages, de l’inattention durant ce petit moment ? C’est normal, propre à ce moment de relâche. Là aussi, laisser faire.

L’attention et la concentration reprennent naturellement chez les élèves avec l’exposé de leur camarade qui commence.

3. Découper les difficultés

Ici l’astuce est de découper les difficultés de votre cours en petits bouts, bien mieux « digérables ». Il ne s’agit pas tant de varier les activités que d’aborder chaque difficulté une à une, étape par étape. C’est souvent le cas lorsque vous abordez un moment théorique de votre cours un peu difficile.

Rappelez-vous que la mémoire de court terme d’un être humain est limitée en capacité et en durée (de 7 à 9 informations simultanées). La focalisation sur une seule tâche à la fois permet d’éviter le sentiment de confusion créé par un nombre trop élevé de données simultanées. Par conséquent il faut s’habituer à se concentrer sur un nombre plus restreint d’éléments. En d’autres termes il suffit d’apprendre une chose à la fois et non pas vouloir se précipiter en voulant tout savoir en un minimum de temps.

Une métaphore pour illustrer cela : Ce n’est pas en se « goinfrant » que l’on se nourrit.

4. Prendre conscience du profil de la classe

Prenez conscience du profil de votre classe. Vous pouvez rester au niveau des profils de compréhension (visuel, auditif et kinesthésique).

Si vous avez un trop gros décalage entre la façon dont vous transmettez l’information (souvent imposé par votre matière), et le profil de votre classe, vous aurez des décrochages évidents de l’attention.

Si vous  enseignez une matière littéraire, elle est transmise essentiellement de manière auditive : le parler et les textes. Cela risque d’être un problème si vous avez une classe de type majoritairement visuel ou kinesthésique. La difficulté est qu’il est n’est pas toujours possible d’enseigner autrement, car la matière ne le permet pas. Par exemple, il est bien difficile d’enseigner le français de façon kinesthésique.

Attention ce n’est pas parce que les élèves ont un profil de type kinesthésique qu’ils ont besoin de bouger. Je vous renvoie à la vidéo où je l’explique ici.

L’usage populaire est de beaucoup utiliser l’aspect visuel en cours. Cela via l’illustration de PowerPoint avec un vidéo protecteur. Cela tout à fait louable et très commun dans les formations en entreprises. Tout est mis sur le visuel. Mais si vous ne contentez pas les élèves ayant un profil de type auditif ou kinesthésique vous perdez votre attention.  L’idéal est d’utiliser la technique de saupoudrage : faire le cours de façon auditive, visuel et kinesthésique.(Voir l’article « S’adapter aux profils d’apprentissage de tous ses élèves. Est-ce possible ? Comment faire ? »).

5. L’attention est renforcée lorsque l’intérêt est accru.

Relier le cours à partir de sujets qui intéressent vos élèves. Ce n’est pas toujours possible. Mais quand vous avez une idée, quand vous avez la possibilité de le faire, faites-le.

En ce qui me concerne, je partais souvent d’un sujet d’actualité pour illustrer un élément de cours ou faire des révisions. Je sollicitais la curiosité des élèves, et donc il était plus facile d’avoir leur attention.

L’autre possibilité est de partir d’une histoire qui peut se dérouler dans le quotidien.

6. L’utilisation des jeux

Les jeux représentent un excellent moyen pour retenir l’attention beaucoup plus longtemps. Ils sont très utilisés dans l’animation de formation. Là encore vous pouvez vous heurter à la contrainte du nombre d’élèves et du sujet abordé. Mais pas besoin de faire appel à de grands jeux. Vous pouvez très bien en imaginer pour votre matière et agrémenter les passages difficiles par des petits jeux d’une durée relativement brève 5 à 10 minutes.

 

C’est un excellent moyen de donner du rythme (voir le point n°1) et d’inciter vos élèves à bouger (voir le point n°2). Pour cela vous pouvez vous aider des aux jeux-cadres de Thiagi. Voir l’article : Jeux cadres : utiliser les jeux pour transmettre un savoir [7]

 

Et vous ?

> Quel(s) moyen(s) utilisez-vous pour susciter l’attention et la concentration de vos élèves.

Indiquez vos réponses dans un commentaire (cela me permettra d’y répondre).

 

Texte : Jean-François MICHEL – Visitez la chaîne YouTube logo-YouTube

( Auteur « Les 7 profils d’apprentissage » Ed.Eyrolles 2005, 2013 et 2019 )

 

[1] Neil A. Bradbury : « Attention span during lectures: 8 seconds, 10 minutes, or more ? »  https://www.physiology.org/doi/full/10.1152/advan.00109.2016

[2 ] Wilson, Karen; Korn, James H. (5 June 2007). « Attention During Lectures: Beyond Ten Minutes ». Teaching of Psychology. 34 (2): 85–89 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00986280701291291

[3] TED – https://fr.wikipedia.org/wiki/Conf%C3%A9rence_TED

[4] Stacey Stothard de Skipton Building Society / Voir l’article de l’independent : Average British attention span is 14 minutes, research finds 27 déc 2017

The independant « Average British attention span is 14 minutes, research finds »

[5] Chez l’être humain, la performance intellectuelle et l’efficience cognitive ne sont pas stables dans la journée, mais fluctuent selon des périodicités.

[6] Thorne, G., Thomas, A., and Lawson, C. (2005). 15 Strategies for Managing Attention Problems. Metarie, LA: Center for Development and Learning. Retrieved Dec. 7, 2009, from from http://www.cdl.org/resource-library/articles/Strategies_For_Managing_Attention.php

[7]  Bruno Hourst, Sivalailam Thaigarajan, Editeur d’Organisation,  déc 2007 Modèles de jeux de formation: Les jeux-cadres de Thiagi 

5 Commentaires

  1. Ce qui me saute aux oreilles est la « concentration » perdue en raison d’une musique de fond sans respiration, trop forte de 6dB en rapport à la voix : pourquoi cette musique ? On fait quoi ? On se concentre sur le cours ou sur la musique ?

    • pourquoi cette musique ? On fait quoi ? On se concentre sur le cours ou sur la musique ?

      Si c’est pour vous motiver à passer à l’action, à vous y mettre, la musique est bon moyen.
      Ensuite une fois que vous vous y êtes mis, couper la musique est un bon moyen pour se concentrer.

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