Dernière modification de l’article le 3 mars 2020 par Admin

 

Avez-vous essayé d’apprendre quelque chose comme une langue étrangère, la danse ou apprendre à conduire ? Vous vous être rendu compte que les débuts sont souvent difficiles voire même parfois très difficiles. Qu’est-ce qui cloche ? Rien! Sachez qu’un début difficile est tout à fait normal. Cela fait partie du processus d’apprentissage. Il est vrai qu’en fonction de leur profil, certains auront plus ou moins de facilité. 

La clé est de persévérer. Plus on persévère, plus le cerveau rendra, peu à peu, l’apprentissage facile.

Voici quelques conclusions utiles pour l’enseignement et la formation et surtout pour des élèves, pour des apprenants, qui ont des difficultés d’apprentissage.

Dossier et article du Dr. John ARDEN auteur du livre « Les 5 clés du cerveau – Pour l’entretenir et le dynamiser » Éditions d’Angles

Le cerveau se modifie

Le cerveau n’est pas immuable ni programmé à vie ou uniquement voué à s’atrophier. Il est doté au contraire d’une grande plasticité et évolue constamment en fonction des expériences que l’on vit. Dans certaines conditions, de nouvelles cellules peuvent même apparaître à n’importe quel âge.

On entend souvent expliquer que ce sont les gènes qui déterminent le comportement, ce qui pourrait laisser craindre que toute évolution soit impossible. En réalité, les gènes se contentent de structurer les potentialités et les points faibles de la personnalité, ils ne dictent pas les pensées, ni les sentiments, ni le comportement. On peut les activer ou les désactiver à volonté en changeant son comportement et son environnement.

Et ce faisant, le cerveau se modifie.


Le vieux débat entre inné et acquis, nature et culture, a fait place à un nouveau modèle : la nature cultivée. De même que les concepts de nature et de culture sont trop souvent mis à tort en opposition, l’esprit et le cerveau ont aussi été considérés comme des entités séparées. Or, ce ne sont que les deux faces d’une même médaille. Tout changement d’état d’esprit amène un changement dans le cerveau, et réciproquement.

Apprendre quelque chose de nouveau recâble le cerveau

On peut entretenir le cerveau en développant ses potentialités et en minimisant ses vulnérabilités. En d’autres termes, on peut modifier sa biologie par ses actions et ses pensées, à f intérieur bien sûr des potentialités limitées de notre espèce.

On ne peut pas vivre 200 ans ou voler comme un oiseau, en revanche on peut vivre potentiellement au-delà de l’espérance de vie moyenne en optimisant sa santé pendant toute sa vie. Et on peut conserver son cerveau aiguisé jusqu’à un âge avancé.


Apprendre quelque chose de nouveau recâble le cerveau en créant et renforçant des connexions synaptiques. Par exemple, si on pense à un beau paysage, comme un village dans les Cinque Terre en Italie, on construit de nouvelles connexions synaptiques entre des groupes de neurones qui enregistrent f image dans la mémoire. Chaque fois qu’on se souvient de cette image, on la renforce.

La théorie de Hebb [1], « des neurones activés en même temps sont des neurones qui se lient ensemble », explique comment le cerveau se recâble quand f individu apprend quelque chose. Plus on pratique l’espagnol, par exemple, et plus un grand nombre de neurones « se déclenchent » et se lient ensemble quand on améliore son vocabulaire et sa prononciation. Et plus il est probable que ces neurones vont ((se déclencher » à l’avenir avec de moins en moins d’efforts.

Que se passe-t-il quand on arrête de pratiquer l’espagnol ?

L’adage « soit on s’en sert, soit on le perd » s’applique là encore et implique que les connexions synaptiques s’affaiblissent, de la même manière que les muscles s’atrophient quand on arrête de faire du sport.
La pente de la courbe d’apprentissage est toujours plus abrupte au début. Apprendre l’espagnol est plus difficile au commencement parce que, excusez-moi le jeu de mots, on est en territoire complètement étranger. Quand on se familiarise avec les intonations, le vocabulaire et la grammaire, on construit une infrastructure de réseau synaptique qui soutient le savoir.

C’est pourquoi je dis souvent qu’apprendre une nouvelle compétence oblige à « faire ce que l’on n’a pas envie de faire ». Il suffit de se souvenir de l’époque des disques vinyles : si celui qu’on écoutait était rayé, il fallait se lever du canapé pour aller déplacer la pointe de lecture afin de passer l’endroit de la rayure.

Apprendre une nouvelle compétence est comme créer un nouveau sillon ou rouler sur une route très enneigée dans les traces d’une autre voiture. Pour faire ses propres traces et se diriger où on veut, il faut forcer sur le volant ; en y repassant parla suite, il sera plus facile de suivre les nouvelles traces.
Ainsi fonctionne le recâblage : sortir des anciennes habitudes et se créer un chemin nouveau et plus positif, Et plus on l’emprunte, plus il est facile de le retrouver.

Quand les neurones « se déclenchent » ensemble, ils le font de plus en plus rapidement et cette amélioration permet plus de précision dans le nombre de neurones nécessaires pour pratiquer une compétence spécifique. Par exemple, quand on apprend à skier, on utilise au début beaucoup de muscles et de neurones.

Quand on s’améliore, les efforts musculaires et le nombre de neurones nécessaires diminue.
On ne peut pas se dire : « J’ai des diplômes universitaires, donc j’ai toute la réserve cognitive dont j’ai besoin ». Il faut continuer à apprendre pour la garder disponible. Souvenez-vous du cas des jongleurs. Ou, pour employer une autre analogie, un jardin doit être continuellement entretenu en travaillant le sol, en arrachant les mauvaises herbes et en arrosant, sinon il va se transformer en friche.

Recâbler le cerveau (neuroplasticité)

Recâbler le cerveau (neuroplasticité) et provoquer la naissance de nouveaux neurones (neurogenèse) reste possible tout au long de la vie, si l’on fait ce qu’il faut :

– La neuroplasticité et l’apprentissage sont les deux faces d’une même médaille.

– La neuroplasticité fonctionne avec un léger degré d’inconfort

– il faut se remettre en question.

– On peut produire de nouveaux neurones dans l’hippocampe et le cortex préfrontal toute sa vie.

– L’exercice aérobie (qui sollicite et améliore la consommation d’oxygène par l’organisme) est l’un des meilleurs moyens de développer le facteur neurotrophique dérivé du cerveau.

Exercices physiques

. Une étude finlandaise portant sur 3 403 personnes [2] a découvert que ceux qui faisaient de l’exercice deux ou trois fois par semaine étaient moins dépressifs, colériques, stressés ou cyniques.

. Une étude hollandaise sur 19 288 jumeaux [3] et leurs familles a découvert que ceux qui faisaient de l’exercice étaient moins anxieux, dépressifs, névrosés, er mieux adaptés à la vie en société.

L’étude de 8 098 personnes [4] réalisée par l’université de Columbia a découvert une même relation inverse entre l’exercice et la dépression.

Les études menées ces vingt dernières années [5] ont montré qu’il serait bien de prescrire de l’exercice physique avant toute psychothérapie et médication pour traiter la dépression. Trente minutes trois fois par semaine, sous forme de marche rapide ou de vélo d’appartement, sont aussi efficaces que des antidépresseurs comme le Zoloft à base de sertraline. Les patients continuant de faire de l’exercice pendant les dix mois de suivi ont mieux réussi à empêcher le retour des symptômes après la fin de leur dépression.

Les résultats de 14 études ont montré que l’exercice aérobie chez les patients souffrant de dépression légère à modérée était plus efficace que les antidépresseurs et aussi efficace qu’une psychothérapie [6]. Pour atteindre un tel résultat, il faut faire de la marche rapide ou de la course trois fois par semaine pendant cinq semaines au minimum.

 L’exercice offre des bénéfices physiologiques qui aident à traiter la dépression

L’exercice offre des bénéfices physiologiques qui aident à traiter la dépression. Par exemple, il améliore l’efficacité de la sérotonine et de la dopamine, deux neurotransmetteurs associés à la diminution de la dépression et qui sont la cible des principaux antidépresseurs. Par opposition à la médication qui provoque des effets secondaires gênants comme l’insomnie, le gain de poids et des problèmes sexuels, l’exercice a des effets secondaires positifs tels qu’un meilleur sommeil, une meilleure gestion du poids et une amélioration de la vitalité sexuelle.

C’est pourquoi je pose souvent la question : « Que préférez- vous, des effets secondaires positifs ou négatifs ? » De nombreuses études ont prouvé que les personnes souffrant d’anxiété et ou de dépression et qui pratiquent régulièrement un exercice (souvent le seul fait de marcher) commencent à se sentir mieux presque instantanément. L’exercice réduit l’anxiété et augmente les sentiments positifs parce qu’il libère des endorphines qui sont des neuropeptides se liant aux récepteurs d’opioïdes dans le cerveau et qui ont des effets analgésiques puissants.

 Exercice physique au quotidien

Quand je n’ai pas pu faire suffisamment d’exercice pendant un certain temps, à cause d’un voyage intercontinental ou d’une série de réunions par exemple, mon corps le réclame, et dès que j’arrive à destination, je fais une longue marche, ce qui me permet par la même occasion de bien dormir.

Quand je suis trop occupé dans la journée pour apprendre quoi que ce soit et que je me sens affamé intellectuellement, je m’arrange pour trouver du temps le matin, afin de lire et d’apprendre quelque chose de nouveau.

Quand je n’ai pas suffisamment de contacts, je le ressens, et je programme donc du temps à passer avec ma famille ou des amis. L’importance des relations sociales est une chose que nous avons en partage. Il n’est pas nécessaire de se limiter toujours aux mêmes personnes et pour la même activité.

Sport collectif

Quand vous faites de l’exercice, ajoutez-y d’autres éléments tels que faire du sport à plusieurs, que ce soit du tennis, du badminton, du volley ou du basket. Tous partagent l’effort physique et vous faites la connaissance de vos partenaires ou apprenez à mieux les connaître. Tout le monde ne joue pas au même niveau et pourtant tous sont encouragés et applaudis quand ils réussissent un coup délicat. Il se construit ainsi un esprit d’équipe qui entraîne des liens sociaux et apporte le facteur relationnel. Après la partie, tout le monde peut partager une bonne rigolade et un repas sain. Chacun s’est ouvert l’appétit et profite de la convivialité d’un déjeuner ou dîner en commun.

Dossier et texte: Dr John ARDEN

[1] Donald O. Hebb « Organization of Behavior »  1949. Voir aussi  Hebbian theory : https://en.wikipedia.org/wiki/Hebbian_theory

[2] Hassmén PKoivula NUutela A. « Physical exercise and psychological well-being: a population study in Finland »  2000 Jan :17-25. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/10642456

[3]  De Moor MHBeem ALStubbe JHBoomsma DIDe Geus EJ. « Regular exercise, anxiety, depression and personality: a population-based study »  2006 Apr;42(4):273-9. Department of Biological Psychology, Vrije Universiteit, van der Boechorststraat 1, 1081 BT, Amsterdam, The Netherlands. mhm.de.moor@psy.vu.nl – https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16439008

[4]  Andrew M. BuschJoseph T. CiccoloAjeng J. PuspitasariSanaz Nosrat, James W. Whitworth, and Matthew Stults-Kolehmainen « Preferences for Exercise as a Treatment for Depression » Ment Health Phys Act. 2016 Mar; 10: 68–72. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4955620/

[5] Lynette L. Craft, Ph.D. and Frank M. Perna, Ed.D., Ph.D. « The Benefits of Exercise for the Clinically Depressed » . 2004; 6(3): 104–111 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC474733/ 

[6] Bartholomew J.8., Morrison D., ciccoro J.T., « Effects of acute exercise on mood and well-being in patients with major depression », Med sci sports Exerc, 37, 2005, p. 2032-2037.

 

Le docteur John Arden est l’un des meilleurs spécialistes mondiaux en neurosciences. Il est directeur du programme de stimulation cérébrale des centres médicaux Kaiser Permanente. Il y exerce aussi en parallèle en tant que psychologue. Il a écrit plusieurs ouvrages, dont le best-seller Améliorer sa mémoire pour les Nuls aux éditions First.


 

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2 Commentaires

  1. Quand je lis un article j’aime apprendre quelque chose. Comme ça a été le cas, et même si c’est bateau de le dire comme ça, j’ai envie de te dire : C’est un bel article, merci.
    J’aime la manière dont il est structuré, surtout avec la partie très concrète de ce qui ce passe dans le cerveau.
    PS le dernier paragraphe de « Que se passe-t-il quand on arrête de pratiquer l’espagnol ? » est écrit en double 😉

    • Bonjour,
      Merci pour votre message et vos encouragements.
      En effet le dernier paragraphe était écrit en double. Nous avons corrigé.

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